Le programme informatique conçu par google a remporté 4 matchs sur 5 face au champion du monde sud-coréen du jeu de go. qui de l’homme ou de la machine est-il le plus fort ?
Alors que le champion du Jeu de Go, Lee Se-Dol domine la discipline depuis plus d’une décennie, la victoire toute récente de la machine sur l’Homme témoigne des avancée de la science sur le développement de l’intelligence artificielle. Le champion qui s’était pourtant déclaré confiant avant le tournoi qui s’est déroulé à Séoul entre les 8 et 15 mars, n’aura finalement réussi qu’à remporter un match sur cinq.
« AlphaGo a joué de manière consistante du début jusqu’à la fin, alors que Lee, qui n’est qu’un être humain, s’est montré par moments vulnérable », a expliqué l’un des anciens entraîneurs du champion sud-coréen, Kwon Kap-Yong. « La machine prenait de plus en plus l’avantage à mesure que le match progressait », a-t-il ajouté. Abattu, le joueur à présenté des excuses à son public: « je ne sais pas quoi dire, mais je crois que je dois d’abord présenter mes excuses », a-il déclaré. « Je m’excuse pour ne pas avoir été à la hauteur des attentes de beaucoup de gens. Je me suis senti en quelque sorte impuissant », a ajouté le champion, qui admet avoir mal jugé les compétences du programme informatique.
Une machine qui apprend de son expérience
Le Jeu de Go, inventé il y a plus de 3000 ans en Chine, ne possède que peu d’experts. Alors qu’il était considéré comme le dernier jeu « classique » dans lequel l’Homme gardait l’avantage sur la machine, l’apparition d’AlphaGo, l’intelligence artificielle développée par DeepMind (une startup rachetée par Google) qui apprend de son expérience, semble mettre les humains hors course. Doté de la technologie « deep learning », le logiciel de Google s’appuie sur des réseaux de neurones profonds ajustables qui permettent de fournir la meilleure réponse possible. Pour preuve, la machine alors moins expérimentée avait déjà battu 5-0 le champion d’Europe en janvier dernier.
Déjà en 1997, l’intelligence artificielle s’était révélée supérieure à l’homme
En matière de jeux de stratégie, il y a bien longtemps que la machine a surpassé l’Homme. Déjà en 1997, le champion du monde d’échecs Garry Kasparov avait perdu face à l’ordinateur Deep Blue d’IBM. Pourtant, la complexité du jeu de Go laissait présager la victoire de l’humain. Alors que le jeu consiste à occuper le plus d’espace sur un plateau quadrillé de 19 lignes sur 19, la multiplicité des combinaisons possibles nécessite de l’intuition et de la créativité, deux capacités propres à l’Homme.
Alors que le champion a abandonné lors du dernier match, la victoire d’AlphaGo tient selon lui à plusieurs éléments psychologiques qui ne relèvent pas de la tactique mais de la condition humaine: « si c’était à refaire, je ne peux pas dire que je gagnerais, mais je pense que sur des aspects de Go pur, l’intelligence humaine peut être meilleure qu’AlphaGo. En revanche psychologiquement, sur la concentration, il est meilleur » Il poursuit: « je ne pense pas nécessairement que AlphaGo me soit supérieur, assure le joueur battu 4 manches à 1. Je pense que l’humain peut toujours faire mieux que l’IA, et c’est pour ça que je regrette de ne pas avoir fait mieux. »
Pour Michael Redmond, joueur professionnel et commentateur de la partie diffusée à la télévision japonaise et chinoise, la supériorité de la machine doit être relativisée. « Je pense que Lee Sedol a perdu deux manches parce qu’il n’avait pas la bonne stratégie, et une parce qu’il a fait une erreur. Si c’était à refaire, je n’irais pas jusqu’à dire que Lee Sedol aurait gagné, mais il aurait eu une tout autre approche. »
Une intelligence artificielle encore imparfaite
Alors que le champion a remporté une partie, l’Intelligence Artificielle s’est révélée être en difficulté lors du 78ème coup du coréen, considéré comme décisif. « J’ai jeté un œil rapide aux registres internes: AlphaGo estimait à moins de 1 sur 10.000 la probabilité du brillant 78e coup de Lee, donc AlphaGo a trouvé celui-ci vraiment surprenant. » Aussi, l’IA ne peut être considérée comme infaillible puisque celle-ci aurait commis plusieurs erreurs, notamment au début de la cinquième manche.
Quant à Lee Sedol, il a promis de revoir sa conception du jeu qu’il pensait maîtriser à la perfection: « la vieille croyance à la créativité humaine et à nos connaissances traditionnelles sur le Go ont été mises à l’épreuve par mon expérience, et je me rends compte que j’ai du travail à faire dans cette direction. »
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