Un genre, une année : le r’n’b en 1971
1971 reste une référence pour de nombreux mélomanes, une année tout simplement incroyable pour la musique : les premiers soubresauts de la soul progressive, l’éclosion de la fusion propre à Miles Davis, une année banalement glorieuse pour les singles pop, l’avènement de légendes du rock (malgré les pertes successives de Jimi Hendrix et Janis Joplin en 1970 et Jim Morrison en 1971) avec des sorties telles que Master of Reality de Black Sabbath, Who’s Next des Who, l’énorme IV des Led Zeppelin et autre Sticky Fingers des Stones. Le cas du R’n’B est plus qu’intéressant car l’année 1971 fut d’une richesse sans commune mesure, en quantité et en qualité, si bien que c’est un véritable moment de (re)découverte qui vous est offert, aux racines du genre.
Certains albums sortis cette année-là sont encore considérés comme des pièces maitresses du genre, une sorte de définition, de codification du R’n’B, le genre lui-même n’étant pas clairement reconnaissable, en témoigne les appellations de l’époque parlant au choix de Soul ou de Funk. Une confusion compréhensible puisque parmi ces chefs-d’œuvre on trouve What’s Going On de Marvin Gaye, Maggot Brain des Funkadelic et There’s a Riot Going On de Sly and the Family, tout trois très différents musicalement et pourtant tous fondateurs d’un « esprit » commun, le rythm n’ blues. Ces albums sont surtout le reflet de l’ambition des groupes de l’époque, une volonté de marquer artistiquement leur temps.
L’année est d’autre part étincelante par la diversité des groupes et des musiques proposées; l’offre était telle que certains mois, le Billboard affichait une série impressionnante de hits, une succession de nom (Aretha Franklin, Marvin Gaye, The Jackson 5, The Undisputed Truth) qu’il n’est pas conseillé de comparer avec l’actuelle. C’est aussi en 1971 que la musique se confronta à sa Némésis, l’économie.
En effet les radios américaines ont décidé d’améliorer l’impact des chansons qu’elles diffusent et par ce biais d’augmenter le nombre de diffusions journalières. Pour cela elles décident de formater la création musicale en un produit de 3min30, prêt à ingérer par le plus grand nombre. Un bon exemple de ce changement est le titre Smiling Faces Sometimes des Undisputed Truth, un titre original brillant de 13 min, une extrapolation psychédélique sur le R’n’B, qui atteint difficilement la 80ème place du Billboard. La magie des billets verts transforma ce titre en un single de 3 min, classé directement 3ème.
https://www.youtube.com/watch?v=8CJZcVi5BA4
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