Décollant ce vendredi 3 mai, la mission Chang’e 6 de la Chine ambitionne d’être la première à ramener sur terre des échantillons provenant de la face cachée de la Lune, considérée comme un véritable mystère. Un défi technologique mais aussi un véritable enjeu politique pour Pékin.
Pourquoi la face cachée de la Lune ?
La mission Chang’e 6 se pose comme une suite directe de la mission Chang’e 4 de 2019. Mais contrairement à cette dernière, qui s’était contentée d’atterrir sur la face cachée de notre satellite naturel, Chang’e 6 aspire à une plus grande ambition : celle de nous ramener des échantillons de cette région encore méconnue. Ce choix pour la face opposée à notre planète n’est pas anodin.
On l’appelle « cachée » car elle n’est jamais visible depuis la terre. Cette dernière est inexplorée et demeure énigmatique pour les scientifiques. « Est-ce que la composition de la face cachée est identique à la face visible ? C’est quelque chose qui reste encore inconnu aujourd’hui », précise Francis Rocard, astrophysicien et responsable d’exploration du Système solaire au Centre national d’études spatiales (CNES).
Un défi technologique sans précédent
Pour réussir cette périlleuse mission, la sonde Chang’e 6 décollera du centre spatial de Wenchang, situé sur l’île d’Hainan en Chine, grâce à la fusée Longue Marche 5, véritable cheval de bataille de l’administration spatiale chinoise.
Son objectif : atterrir au niveau du cratère Apollo pour alunir sur le bassin Pôle Sud-Aitken, l’une des régions où l’épaisseur de la croûte lunaire est la plus fine. C’est également un lieu où un astéroïde aurait percuté et révélé le manteau lunaire, une structure inatteignable sur Terre où la croûte continentale du manteau terrestre fait 35 km d’épaisseur.
Pas seulement une victoire scientifique
Si la réalisation de cette mission est un enjeu majeur sur le plan scientifique, elle l’est tout autant sur le plan politique.
En effet, il s’agit également pour la Chine de davantage asseoir sa présence, jusque là discrète, dans le club fermé des grandes puissances spatiales. « La Chine a choisi de s’intéresser à la face cachée de la Terre pour accomplir à son tour une “première” qui va susciter un intérêt universel », analyse Isabelle Sourbès-Verger, géographe et directrice de recherches au CNRS spécialisée dans les politiques spatiales.
En route vers la conquête de l’espace
La collecte des échantillons par la sonde Chang’e 6 ne se fera pas sans pression. Une fois posée, elle ne disposera que de 48 heures pour réussir sa collecte avant de redécoller à destination de la Terre. En tout, la mission est censée durer 53 jours pour un retour sur notre planète d’ici la mi-juin.
Cette mission Chang’e 6 constitue une étape supplémentaire dans la conquête de l’espace par la Chine. La communauté internationale a désormais les yeux tournés vers celle-ci, non seulement pour le succès de la mission, mais aussi pour voir comment cette nouvelle avancée pourrait rebattre les cartes de la géopolitique spatiale.
Serons-nous prêts à accueillir les résultats de ce voyage inaugural vers l’inconnu, non seulement comme une victoire pour la Chine, mais comme une progression pour toute la communauté scientifique mondiale ?