Et je n’aurais pas dû !
Marchant avec délectation et sans gêne dans les sombres traces de la mode du prequel, Pan, dont la sortie est prévu le 21 octobre prochain, prend au fil des minutes des allures de nourriture visuelle et sonore indigeste, presque un vomitif. Le concept en lui-même est totalement dénué d’intérêt et de logique: quel pourrait bien être l’objectif de vouloir à tout prix expliquer l’inexplicable ? Pourquoi s’échiner à faire un film qui se confond trop souvent avec le vide absolu, dans le seul but de démystifier ce personnage qui fit rêver bon nombre de génération ?
Le coupable, pardon, le réalisateur, Joe Wright, avait certainement d’excellentes raisons en souhaitant redonner vie au célèbre Peter Pan. Et à l’instar d’autres personnages légendaires du cinéma, il eut été, je pense, fort respectable et respecté de laisser persister le mystère autour de Peter, plutôt que s’arracher les cheveux et ceux des spectateurs afin de l’expliquer. Dark Vador n’a pas suffit à Hollywood qui s’attaque aujourd’hui à Peter Pan, Barbe-Noire et tous leurs copains.
Barbe-Noire rencontre Kurt Cobain
Hier, bien mal m’en a pris, j’ai vu Pan, et s’il m’est difficile de conter mon ennui tout en restant le plus courtois possible, je vais tout de même vous donner les raisons d’un tel rejet. Déjà, pardonnez-moi, mais je vais vous épargner la synthèse du scénario, une histoire catastrophique qui boîte en permanence notamment à cause des absences à répétition dont ont fait preuve le(s) scénariste(s): trop de rebondissements, comme si le réalisateur cherchait à masquer ses faiblesses par le biais d’artifices redondants, une défaillance qui malheureusement entraîne tous le monde dans sa chute, personnages et spectateurs inclus.
Pour faire court, Pan centre son intrigue sur Peter (Levi Miller) qui cherche inlassablement à retrouver sa mère, une quête a priori intéressante conduisant notre jeune héros des bas-fonds d’un Londres en proie à la guerre au légendaire bateau de Barbe-Noire, interprété par Hugh Jackman. L’acteur, lassé de sortir les griffes, semble s’être laissé aller à son envie de devenir Jack Sparrow, le génie en moins. Le spectateur sera quelque peu atterré lors de l’entrée du mythique pirate, une entrée en scène sur le thème Smells Like Teen Spirit, une anachronie qui se veut drôle mais qui tend surtout à prouver l’abus de liquides frelatés de la part de l’équipe du film. N’est pas Shrek qui veut. Les références foireuses ne s’arrêtent pas là, puisque Joe Wright s’est fendu d’un nombre incalculable « d’hommages », tous aussi pertinents et cohérents les uns que les autres: Matrix, La Momie et Moulin Rouge pour ne citer que le trio de tête.
WTF ?
Et visuellement, qu’est-ce que cela donne ? Une agression permanente de nos deux sens primordiaux lors d’un visionnage: l’ouïe et la vue. À l’oreille, difficile de distinguer quoi que ce soit, c’est le bordel, un chaos semblable à celui présent dans la tête du metteur en scène. En termes d’images, le débat est relativement plus ouvert: il est clair que les personnes épileptiques vont passer un sale quart d’heure, oppressés par la 3D et les effets spéciaux inutiles, tandis que les autres auront l’impression d’être en phase descendante d’un trip à l’acide au milieu d’un magasin de peinture. Et les enfants dans tout cela ? J’ai le regret de vous informer que sieur Wright n’a pas pensé à vous, dommage.
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