Décryptage de la nouvelle série de la chaîne Showtime, Billions.
Hier j’ai vu Billions, une série originale créée par la chaîne Showtime. Pour dire vrai, j’y suis allé les yeux fermés tant le CV du canal américain est impressionnant: Shameless US, Homeland, The Affair, bientôt Twin Peaks, pas vraiment de raisons de se méfier.
Premier étonnement, la série se déroule dans un univers plus répugnant que fascinant, le merveilleux monde de la finance et sa horde de traders qui ont fait allégeance aux billets de banque. Puis Billions met en scène le cœur de son intrigue, la lutte acharnée que se mène deux hommes puissants: le premier est le nouveau roi de Wall Street, Bobby « Axe » Axelrod, parti de rien et arrivé au sommet par la force du poignet et une bonne paire de chaussures pour écraser le premier venu. Le second est le procureur Chuck Rhoades, spécialisé dans les affaires financières: une spécialité qui semble être à la fois d’ordre moral, la lutte contre le mal, ce genre de chose, mais aussi d’ordre personnel, un moyen rapide et efficace de gravir les échelons.
Axe vs Chuck, round 1.
La guerre des égos
C’est bien de cela dont il s’agit, d’une guerre d’égos entre deux personnages qui possèdent déjà tout, épouse magnifique, maison immense, position plus que privilégiée et surtout le pouvoir. Et comme celui-ci est difficilement quantifiable, il va de soi que leurs égos respectifs prennent le dessus, enivrés par le pouvoir, ils leur en demandent toujours plus, jusqu’à cet affrontement titanesque des deux mâles alpha.
Sur ce point, les personnes en charge du casting de Billions ont fait un fantastique boulot, les deux acteurs principaux, Damian Lewis et Paul Giamatti ont un charisme fou et chacun endosse parfaitement son costume. Damian Lewis fait un trader très convaincant, calme, froid et calculateur comme on peut l’attendre d’un tel personnage. Paul Giamatti est lui aussi exceptionnel dans son rôle de procureur nerveux, à la vie sexuelle douteuse.
Dans cette guerre, chacun joue avec ses armes, Axe le financier étouffe la concurrence et les problèmes quotidiens avec un flot démesuré de billets verts, dans le seul but de gagner plus d’argent, tandis que le plus ou moins preux procureur cherche à s’adjuger la tête d’un cador de Wall Street, en éliminant tous ceux, associés de près ou de loin avec Bobby Axelrod. Dès lors c’est un véritable déferlement de méthodes plus basses les unes que les autres, machinations, manipulations, comme Chuck Rhoades le dit lui-même : « Un bon matador ne cherche pas à tuer le taureau tout de suite. Il attend d’abord de l’avoir blessé plusieurs fois ».
Et la finance devint divertissante
Je dois le confesser, avoir vu Billions laisse un arrière-goût en bouche pour le moins étrange, une sensation d’apprécier le détestable. Avec un tel sujet en toile de fond, je m’attendais à une plongée en profondeur dans la piscine aux requins de Wall Street, une mise au pilori commentée et imagée de ce jeu ignoble instauré par le capitalisme. Il n’en est rien, Billions trace sa route, œillères en place, constamment centrée sur ce combat de coqs plaqués or, de l’argent omniprésent qu’il ne faut pas remettre en question comme nous y incite Bobby « Axe » Axelrod dès le premier épisode avec ce: « Depuis quand les gens détestent-ils les riches dans ce pays ? ».
Et le pire est qu’on s’abandonne à cette facilité, à cette porte ouverte à la non-prise de tête. Peu à peu immergé dans la somptueuse vie des riches de ce monde, les questions n’ont plus d’importance, seul le résultat compte, et je me surprends à rire de ce jeu de prestige et d’arrogance. Bref, hier j’ai vu Billions, et je dois l’avouer, j’ai aimé.